vendredi, novembre 27, 2009

d'un certain point de vue

Dessiner en tant que faire l'annonce de son angle de vue.








Le corps

Lieu de l’identité
Lieu de vérité
Lieu de mémoire d’avant le langage.
Lieu d’expériences.
Lieu résiduel
Lieu de résidence.

Graphiquement, il s’agit d’une forme globale découpée
ou qui se découpe de l’espace
ou qui est espace découpé.

C’est un paysage qui reçoit la lumière.
C’est une nature en mouvement
C’est une île :
C’est une topique dont les plans sans cesse sont en mouvement.
Le corps nous accompagne et sagement nous précède bien souvent.
Encore faut-il l’entendre.
Il en a souvent « plein le dos ! ».

Pourquoi cet acharnement parfois,
cette obstination récurrente dans la représentation du corps ?

Le corps est un lieu résiduel.
C’est en lui que réside le champ de notre mémoire, tout ce qui figure le tracé de notre propre histoire, fabrique des plis et donne à voir le relief de notre âme.
Laborit ou Atlan qui nous dévoilent l’invisible de cette mémoire singulière ouverte à la mémoire globale de l’homme dans ses gènes.
Le corps est résonnant.
Nous aurions effectivement emmagasinée à l’intérieur de nous, toute la mémoire génétique des hommes depuis la nuit des temps. De sorte qu’en situation de danger, ce qui d’habitude se range à l’échelon de « l’instinct de vie » pour l’homme du commun, n’est en fait que l’acte de puiser au fond de cette mémoire collective de survie, pour trouver in extremis de quoi se sauver la peau.

Notre corps est un registre, un livre explorable à l’infini.
C’est aussi une carte routière froissée, aux ombres pleines de plis.
Notre corps annonce le préalable des limites dont la silhouette rend compte.
On pense à la « maison de l’être » d’Heidegger bien sûr, le lieu fondateur du « je » sujet, assujetti à la perméabilité de ses frontières qui font trait de sa personnalité. C’est dans l’acte de se projeter à l’ouvert au coeur de « l’habitacle de la perte » que le corps indique ce qu’il vit, ce qui en lui s’ébranle, comme il gère toutes les secousses des mises à l’épreuve. 















Le corps s’éprouve et dès lors vit ce qu’est le sujet qui l’occupe.
Un dessin dit comment son auteur circule et vise à le transcrire d’un trait.
Cette vie animée via le corps dépose toutes les questions du vivant, sous l’éclairage ici et là présent en ce lieu-dit.
C’est un dedans et un dehors oscillant qui génère la ligne et la justesse graphique de bornes. 
Pour visualiser il faut bouger. 
L’usage de l’oeil n’apporte rien qui vaille. La lecture se fait d’ailleurs, du dedans en mouvements pour se connecter au dehors donné à voir, et rendre compte de l’invisible histoire du présent, ici et maintenant, animé dans le corps.

Le corps se pose sans cesse comme question dans toute pensée. Il réfléchit tel le miroir....

On devient son propriétaire. 
L’habiter consiste à le faire raisonner en vue de s’acheminer vers sa parole.
L’idée d’incarner sa pensée se situe là.
Le corps fonde notre présence ici.
Il dévoile la relation que nous entretenons avec nous-mêmes et tout autant celle que nous tissons avec le monde.

Prendre le parti de ne rien apprendre sans corps dénonce le parti pris du dessin.
Le trait en tant que fil conducteur, fait trace sans cesse de notre vérité délivrée.
On creuse son sillon. La mémoire s’imprime.
Dessiner relate le poids du corps, son implication simultanée dans l’acte de penser.
Dessiner, écrire sont la même activité cérébrale à la merci des sensations du corps.
... Juste une question de langage choisi.

Quel régal de lire Bachelard si attentif à la puissance de l'image...

Voici ce qui peut tenir lieu d'une introduction à sa "Poétique de l'espace".

"... L’image poétique échappe à la causalité. De là, sa gravité. Comment une image parfois très singulière peut-elle apparaître comme une concentration de tout le psychisme ? Sont associés l’acte de conscience donatrice et le produit le plus fugace de la conscience : l’image poétique.

C’est une question de présence, soit d’abandon des savoirs. L’image dans sa simplicité n’a pas besoin d’un savoir. Elle est toujours origine du langage. Elle se situe avant la pensée.

Il faut s’y jeter au centre, au cœur, au rond-point où tout prend sa source et son sens.




 


Et voilà que se retrouve le mot oublié ou réprouvé, « l’âme », lumière intérieure, vision intérieure, véritable renversement des perspectives psychologiques réclamé par celui qui veut comprendre en aimant.

Un peintre qui parle peinture, sait qu’il est producteur de lumières. Il sait de quel foyer part l’illumination. Dans les poèmes se manifestent des forces qui ne passent pas par les circuits d’un savoir, et les causes alléguées par le psychologue ou le psychanalyste ne peuvent jamais bien expliquer le caractère inattendu de l’image poétique. La rêverie est une instance psychique qu’on confond trop souvent avec le rêve. L’esprit peut connaître une détente, mais dans la rêverie poétique, l’âme veille, sans tension, reposée et active. Avant d’émouvoir la surface, l’image touche les profondeurs. Elle est un être nouveau de notre langage. Elle est à la fois un devenir d’expression, et un devenir de notre être, l’expression créée de l’être. En cela, le psychanalyste qui intellectualise l’image, perd son retentissement, tout occupé qu’il est à débrouiller l’écheveau de ses interprétations. Pour lui, elle a toujours un contexte. Or la conscience imaginante est origine. Rien ne prépare une image poétique, surtout pas la perception dans le mode psychologique. L’image poétique pose purement le problème de la créativité de l’être parlant.





 

Il y aurait de la part de chacun une véritable immodestie à assumer une puissance de lecture qui retrouverait et revivrait la puissance de création organisée et complète touchant l’ensemble d’un poème, d’un tableau, d’une musique, enfin, d’une image poétique sous tout support de langage choisi. Adonnés à la lecture ( ou la vision ou l’écoute)heureuse, nous ne lisons, ne retenons que ce qui nous plaît, avec un petit orgueil de lecture mêlé à beaucoup d’enthousiasme. En tous les cas, tout lecteur qui relit une œuvre poétique qu’il aime, sait que les pages aimées le concernent.

Un grand vers peut avoir une grande influence sur l’âme d’une langue. Il réveille des images effacées, et en même temps, il sanctionne l’imprévisibilité de la parole. Or rendre imprévisible la parole, n’est-il pas un apprentissage de la liberté ?

L’image poétique échappe à la causalité. De là, sa gravité. Comment une image parfois très singulière peut-elle apparaître comme une concentration de tout le psychisme ? Sont associés l’acte de conscience donatrice et le produit le plus fugace de la conscience : l’image poétique.

C’est une question de présence, soit d’abandon des savoirs. L’image dans sa simplicité n’a pas besoin d’un savoir. Elle est toujours origine du langage. Elle se situe avant la pensée.

Il faut s’y jeter au centre, au cœur, au rond-point où tout prend sa source et son sens.Et voilà que se retrouve le mot oublié ou réprouvé, « l’âme », lumière intérieure, vision intérieure, véritable renversement des perspectives psychologiques réclamé par celui qui veut comprendre en aimant.

Un peintre qui parle peinture, sait qu’il est producteur de lumières. Il sait de quel foyer part l’illumination. Dans les poèmes se manifestent des forces qui ne passent pas par les circuits d’un savoir, et les causes alléguées par le psychologue ou le psychanalyste ne peuvent jamais bien expliquer le caractère inattendu de l’image poétique. La rêverie est une instance psychique qu’on confond trop souvent avec le rêve. L’esprit peut connaître une détente, mais dans la rêverie poétique, l’âme veille, sans tension, reposée et active. Avant d’émouvoir la surface, l’image touche les profondeurs. Elle est un être nouveau de notre langage. Elle est à la fois un devenir d’expression, et un devenir de notre être, l’expression créée de l’être. En cela, le psychanalyste qui intellectualise l’image, perd son retentissement, tout occupé qu’il est à débrouiller l’écheveau de ses interprétations. Pour lui, elle a toujours un contexte. Or la conscience imaginante est origine. Rien ne prépare une image poétique, surtout pas la perception dans le mode psychologique. L’image poétique pose purement le problème de la créativité de l’être parlant.







Il y aurait de la part de chacun une véritable immodestie à assumer une puissance de lecture qui retrouverait et revivrait la puissance de création organisée et complète touchant l’ensemble d’un poème, d’un tableau, d’une musique, enfin, d’une image poétique sous tout support de langage choisi. Adonnés à la lecture ( ou la vision ou l’écoute)heureuse, nous ne lisons, ne retenons que ce qui nous plaît, avec un petit orgueil de lecture mêlé à beaucoup d’enthousiasme. En tous les cas, tout lecteur qui relit une œuvre poétique qu’il aime, sait que les pages aimées le concernent.

Un grand vers peut avoir une grande influence sur l’âme d’une langue. Il réveille des images effacées, et en même temps, il sanctionne l’imprévisibilité de la parole. Or rendre imprévisible la parole, n’est-il pas un apprentissage de la liberté ?

L’atomisme du langage conceptuel réclame des raisons de fixation, des forces de centralisation.

Très nettement, l’image poétique apporte une des expériences les plus simples de langage vécu.
Chercher des antécédents à une image, alors qu’on est dans l’existence même de l’image, c’est une marque invétérée de psychologisme. Or la poésie dépasse constamment ses origines, et pâtissant plus loin dans l’extase ou le chagrin, elle demeure plus libre. L’effet de sublimation surplombe la psychologie de l’âme terrestrement malheureuse. C’est un fait : la poésie possède un bonheur qui lui est propre. Le psychanalyste peut bien étudier l’humaine nature des poètes, mais il n’est pas préparé, du fait de son séjour dans la région passionnelle, à étudier les images poétiques dans leur réalité de sommet.
Dès qu’un art devient autonome, il prend un nouveau départ.
Même dans un art comme la peinture, qui porte le témoignage d’un métier, les grands savoirs sont hors métier.
Il faut donc que le savoir s’accompagne d’un égal oubli du savoir.
Le non - savoir n’est pas une ignorance, mais un acte difficile de dépassement de la connaissance. C’est à ce prix qu’une œuvre est à chaque instant cette sorte de recommencement pur qui fait de sa création un exercice de liberté. S’il y a un métier c’est dans la tâche subalterne d’associer des images.
L’art est un redoublement de vie, une sorte d’émulation dans les surprises qui excitent notre conscience et l’empêche de somnoler.



 
Souvent, l’image poétique est à tort, confondue avec la simple métaphore. Fruit de l’imagination proprement dite, sa production d’images est comme une puissance majeure de la nature humaine. Dans ses vives actions, elle nous détache à la fois du passé et de la réalité. Elle ouvre sur l’avenir. L’espace saisi par l’imagination ne peut rester l’espace indifférent livré à la mesure et à la réflexion du géomètre : il est vécu.
… Vécu non pas dans sa positivité, mais avec toutes les particularités de l’imagination tel qu’elles nous habitent intimement. Car non seulement nos souvenirs, nos oublis, sont logés en nous, de même notre inconscient est logé. « Notre âme est une demeure ».
Ainsi, une recherche sur les images de l’intimité pose de fait, le problème de la poétique de la maison.
La maison de l’homme peut-être prise pour la maison des choses.
… maison des tiroirs, des coffres, des armoires. Que de psychologie sous leurs serrures ! Chacune porte en soi une sorte d’esthétique du caché. Croyant parfois étudier les choses, on s’ouvre seulement à un type de rêveries. Dans nos maisons mêmes, ne trouvons-nous pas des réduits et des coins où nous aimons nous blottir ? N’habite avec intensité que celui qui a su se blottir.
La maison est, de toute évidence, un être privilégié, en la prenant à la fois dans son unité et sa complexité, en vue d’y intégrer toutes les valeurs particulières dans une valeur fondamentale. La maison fournit à la fois des images dispersées et tout un corps d’images.
Dans l’un et l’autre cas, l’imagination augmente les valeurs de la réalité".