Les ravages du maternage
par Catherine Cisinski _ La page Art-thérapeute, dimanche 10 juin 2012, 13:32 ·
==Harassées par les tâches quotidiennes, culpabilisées par l’image exigeante de la « bonne mère »,
les femmes doivent assumer l’essentiel des soins donnés aux enfants.
Quand l’émancipation féminine se heurte à la dure réalité du maternage
quotidien, l’image d’Épinal de la mère épanouie en prend un coup.
« Ahhhh ! C’est merveilleux. Vous verrez, ce sont les plus belles années de votre vie. »
Combien de parfait(e)s inconnu(e)s m’ont-ils tenu ces propos dans la
rue tandis que je cherchais péniblement à avancer avec la petite
dernière déjà lourde en porte-bébé et l’aînée qui traîne des pieds. Et
de répondre : « Oui, bien sûr… »le
sourire crispé par les nuits sans sommeil, les insupportables caprices,
les matins qui déchantent quand c’est le sprint pour conduire l’une à
la crèche, l’autre à l’école avant de se ruer, déjà épuisée, au travail.
Mais de quoi faudrait-il se plaindre ? N’est-ce pas « merveilleux »
d’être mère ? Honte à celles qui osent émettre la moindre réserve.
Il
est entendu qu’elles doivent être les plus heureuses du monde, comblées
par d’adorables bambins, aimants et souriants. Pourtant des voix de
plus en plus nombreuses s’élèvent pour noircir le tableau idyllique. Les
mères se rebifferaient-elles ? Des témoignages, des enquêtes, des
fictions brisent le tabou et disent leur épuisement, la culpabilisation
dont elles sont victimes, leur solitude, le poids des normes sociales,
la dépossession de soi…
Barbara, l’héroïne d’Un heureux événement (Albin Michel, 2005), le roman d’Éliette Abécassis dont l’adaptation vient de sortir au cinéma, dit son désenchantement : « Faire un enfant est à la portée de tous, et pourtant peu de futurs parents connaissent la vérité, c’est la fin de la vie. »
Un jugement lapidaire mais qui dit le désespoir de cette jeune mère
thésarde en philosophie dont la vie ne tourne désormais plus qu’autour
du bébé. Avec, à la clé, une sociabilité réduite à néant et un couple en
plein naufrage.
Dans Mère épuisée (Les liens qui
libèrent, 2011), Stéphanie Allenou dresse un tableau à peine moins
sombre de la maternité et témoigne avec une rare franchise de sa longue
descente aux enfers. Surtout quand on a non pas un seul mais plusieurs
enfants. Sa fille a seulement 20 mois quand elle donne naissance à des
jumeaux.
La tyrannie de la bonne mère
Le
rêve tourne alors vite au cauchemar. Épuisement, isolement, difficultés
conjugales, manque de solidarité familiale… L’image de la bonne mère se
fissure. « Je ne vois que des petits
tortionnaires qui mettent en danger ma survie. Cela fait de moi une
“mauvaise mère” et d’eux de “mauvais enfants”. Je bous de colère.
Celle-ci est à peu près contenue pendant la nuit, mais elle finit
toujours par exploser dans la journée. » Ou encore : « Une
sourde angoisse monte petit à petit. La rage intérieure que je tente de
maîtriser est croissante, et j’explose fréquemment. Je crie fort. De
plus en plus fort. Je tape maintenant facilement : des fessées le plus souvent, des gifles parfois. (…) Je me sens complètement étrangère à moi-même et en total décalage avec l’idée que je me fais d’une mère “suffisamment bonne”. » Elle va jusqu’à penser tout plaquer : « Il
me prend très souvent l’envie de partir, de quitter toute la famille.
Par trois fois, lors de sorties dans un parc, je suis à deux doigts de
franchir le pas. » Happy end malgré tout. La scolarisation de ses enfants lui permet de construire un projet professionnel et de renaître à la vie.
S. Allenou ainsi que de nombreuses autres femmes n’hésitent pas à parler de « burnout » maternel, une notion que la psychologue Violaine Guéritault a popularisé il y a quelques années (La Fatigue émotionnelle et physique des mères. Le burnout maternel, Odile Jacob, 2004). Maryse Vaillant, elle-même psychologue, a même titré son dernier ouvrage Être mère : mission impossible ? (Albin Michel, 2011). Avec un constat réaliste : « Le
bonheur est difficile aux mères. Et c’est un des plus forts paradoxes
qui soient, la maternité promettant plus d’enchantements que de
meurtrissures. » Et, pour enfoncer le clou, la
psychologue d’expliquer que les difficultés sont loin d’être seulement
celles du maternage, des soins portés aux bébés. C’est tout au long de
la vie, et pas seulement les premières années, qu’être mère, a fortiori une « bonne mère », est difficile.
«
Être une bonne mère », vouloir ce qu’il y a de mieux pour son enfant,
veiller en toutes choses à sa sécurité et à son épanouissement et
surtout être d’une disponibilité sans faille. Voilà une injonction qui
pèse lourdement. Et peut-être aujourd’hui plus qu’hier. Dans un livre
qui souleva de vifs émois, Le Conflit. La femme et la mère
(Flammarion, 2010), Élisabeth Badinter pointait le risque d’un retour en
arrière sous couvert d’un retour à la nature. Lait maternisé, petits
pots industriels ou couches jetables sont l’objet d’opprobre tandis que
l’on vante l’allaitement à la demande ou les couches lavables. De plus
en plus d’études scientifiques entendent réhabiliter le concept
d’instinct maternel, déplore-t-elle. Dans son viseur aussi, les
féministes différentialistes trop enclines à faire de la maternité le
cœur de l’identité féminine. Des menaces bien réelles selon É. Badinter
pour l’émancipation des femmes qui peinent déjà à concilier travail et
famille. Pas étonnant dès lors que de plus en plus de femmes
décideraient de ne pas avoir d’enfants. Et si les Françaises parviennent
à maintenir un fort taux d’activité professionnelle et le meilleur taux
de natalité en Europe, c’est notamment grâce aux aides et aux
dispositifs publics de garde des enfants en bas âge. Mais surtout,
estime É. Badinter, les Françaises – pour l’heure – résisteraient mieux
aux prescriptions qui les assaillent.
La journaliste américaine
Judith Warner a bien vu la différence. Jeune mère, elle passe quelques
années en France où elle se sent épaulée notamment grâce aux aides dont
les femmes peuvent bénéficier : congé maternité, congé parental, gardes
d’enfant de qualité pas trop onéreuses. Grâce aussi au discours ambiant
qui valorise l’épanouissement des mères et le maintien de leur activité
professionnelle. Le choc est rude quand elle rentre aux États-Unis. Elle
perçoit alors un profond malaise chez les mères américaines et décide
de mener l’enquête, interviewant près de 150 femmes, issues pour la
plupart des classes moyennes ou classes moyennes supérieures. Dans Mères au bord de la crise de nerfs
(Albin Michel, 2006), elle pointe en particulier la culpabilité des
mères américaines engagées dans une folle course à la performance.
La peur des carences affectives
Culpabilité
des mères qui travaillent et qui ont le sentiment d’abandonner leurs
enfants. Culpabilité de celles qui se consacrent entièrement à leur
foyer mais qui sont engagées dans un perfectionnisme qui les rend
toujours insatisfaites. Si ces mères disent leur joie de se consacrer à
leur famille, elles avouent aussi leur épuisement, leur frustration,
leur manque de reconnaissance, le sentiment de n’être jamais à la
hauteur. Passant leur temps à faire le taxi pour amener les marmots au
base-ball, à la danse ou au cours de piano, à faire le ménage, à
mitonner de bons petits plats faits maison, à organiser les goûters
d’anniversaire ou les fêtes des écoles, à favoriser l’éveil de leurs
enfants et leur réussite scolaire… D’où la frustration de nombreuses
mères qui ont renoncé à leur carrière. D’où l’absence des pères qui
travaillent comme des fous pour nourrir seul le ménage dans un contexte
économique difficile. Les causes sont multiples, mais J. Warner pointe
notamment la vulgarisation, en particulier dans la presse féminine, de
la théorie de l’attachement* développée par John Bowlby. Les mères sont
désormais culpabilisées car elles craignent de créer des « carences
affectives ». Elles sont persuadées que l’avenir de leurs enfants est
entre leurs mains et qu’à ce titre elles doivent tout faire pour eux.
Quoi qu’il leur en coûte.
Le puérocentrisme
Après
s’être durement battues, les femmes sacrifieraient-elles aujourd’hui
leur émancipation à leur progéniture ? Dans un récent ouvrage, Mères sous influence. De la cause des femmes à la cause des enfants (La Découverte, 2011), la sociologue Sandrine Garcia interroge « l’exercice durable d’un magistère moral sur les parents, et en particulier les mères » : « Ce
qui est institué, sans relâche, c’est que la famille est pathogène, que
ce soit parce que le père vient à manquer, parce que les mères ne sont
jamais à la hauteur de leurs tâches, parce que l’inceste rôde, parce
qu’on attend trop de ses enfants, qu’on ne sait plus dire “non” ou au
contraire qu’on se montre trop violent, que les rôles sexuels sont
brouillés, que l’ordre symbolique est menacé, etc. »
Les experts, les psychologues en particulier, en ne s’attachant qu’à
l’intérêt de l’enfant, jouent un rôle important dans la culpabilisation
des mères. Le « puérocentrisme » qui s’est instauré dans nos sociétés
menace la « cause des femmes », leur émancipation et leur
épanouissement. S. Garcia interroge notamment la construction par
Françoise Dolto d’une « cause de l’enfant ». Elle montre l’ambiguïté de
cet héritage qui a permis de rompre avec des pratiques éducatives
autoritaires et rigides, mais au prix de l’assignation des femmes à
leurs devoirs de mères d’abord et avant tout. Sa lecture de la
charismatique psychanalyste est sans appel : « Articulées
les unes aux autres, les prescriptions que F. Dolto livre au fil de ses
différents ouvrages ou émissions définissent les contours d’un
puérocentrisme maternel d’une grande exigence : les
mères doivent être disponibles ou faire en sorte de le devenir, porter
leur enfant toute la journée dans les bras s’il en a besoin, être
attentives pendant les repas et au moment du coucher, prendre du temps
pendant la journée pour jouer avec lui et, s’il est petit, montrer tous
les dangers de la maison, verbaliser toutes leurs actions, trouver des
sanctions parfois extrêmement sophistiquées, surtout avoir des attitudes
éducatives extrêmement réfléchies pour ne pas donner libre cours à
leurs impulsions, etc. » Or cette disponibilité
sans faille fait trop peu de cas des contraintes – temporelles,
budgétaires, professionnelles – qui pèsent sur les choix des mères.
Une conciliation au féminin
Car
leurs contraintes ne sont pas seulement d’ordre psychologique. Elles
sont aussi très concrètes. Alors qu’elles travaillent majoritairement,
ce sont toujours elles qui assument l’essentiel des tâches ménagères et
du maternage. Et même quand le père participe, c’est souvent en tant
qu’exécutant. La charge mentale liée à l’organisation repose en général
sur les femmes. Si le papa amène l’enfant chez le pédiatre, c’est la
mère qui bien souvent y aura pensé et aura pris rendez-vous. En ce sens,
la question de la conciliation travail-famille est presque
exclusivement féminine. Le taux d’activité des hommes ne dépend pas du
fait qu’ils ont ou non des enfants, pas plus que la progression de leur
carrière. Pour les femmes, en revanche, les choses sont plus difficiles,
d’autant plus que la maternité les oblige à des ruptures de carrière.
L’activité professionnelle des femmes dépend beaucoup du nombre et de
l’âge des enfants. En 2008, 90 % des femmes qui n’ont pas d’enfant de
moins de 18 ans sont actives alors que c’est le cas de seulement 43 % de
celles qui vivent avec au moins trois enfants dont le plus jeune a
moins de 3 ans (1). Et ce sont majoritairement des
femmes qui prennent un congé parental. Nul besoin cependant d’être
misérabiliste : Laurence Cocandeau-Bellanger, auteure de Femmes au travail. Comment concilier vie professionnelle et vie familiale
(Armand Colin 2001), a ainsi mené une enquête auprès d’une centaine de
femmes ayant à la fois une activité familiale et une activité
professionnelle. Elle montre que celles-ci se disent globalement
satisfaites de leur vie générale (3,97 sur une échelle qui va de 1 : pas
du tout satisfaite à 5 : très satisfaite). Elles le sont cependant
moins de leur vie professionnelle (moyenne 3,28) que de leur vie
familiale (moyenne 4,31).
Au-delà des chiffres, il faut noter les
fortes inégalités sociales pesant sur la conciliation travail/famille.
Pour les femmes cadres, il est souvent difficile d’obtenir un temps
partiel, les temps de travail sont souvent lourds, mais elles disposent
de plus de moyens financiers pour être aidées, que ce soit pour le
ménage ou pour faire garder les enfants. Inversement, celles qui ont des
revenus faibles rencontrent des obstacles matériels. Face aux frais de
garde, elles peuvent être tentées de cesser leur activité
professionnelle. Avec d’inévitables conséquences sur leur carrière.
Alors
quelles solutions pour aider les mères ? Rien de bien miraculeux.
Favoriser les aides institutionnelles bien sûr, mais surtout diminuer la
pression sociale sur les femmes qui favorise leur culpabilisation et
faire évoluer les représentations sociales des hommes pour les amener à
davantage s’investir dans leur parentalité. Bouleversement qui ne se
fera pas en un jour. Pour l’heure, reste aux femmes à essayer vaille que
vaille de tenir le coup et d’éviter la crise de nerfs…
NOTE
(1) Voir Claude Minni et Julie Moschion, « Activité féminine et composition familiale depuis 1975 », Darès Analyses, n° 27, mai 2010.
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Théorie de l’attachement
Forgée
par le psychanalyste John Bowlby après la Seconde Guerre mondiale, dans
un contexte où de nombreux enfants ont été séparés de leurs parents,
cette théorie fait de l’attachement continu et stable à une personne qui
prend soin de lui (care-giver) un des besoins primaires du bébé, indispensable à son bon développement émotionnel et social.
La «bataille du lait»
Faut-il
ou non allaiter son enfant ? Les professionnels sont aujourd’hui
presque tous d’accord : l’allaitement est l’aliment idéal de l’enfant.
Les bénéfices sont multiples : l’allaitement préviendrait ainsi l’enfant
de l’obésité mais aussi de nombreuses maladies grâce aux anticorps. Les
bénéfices seraient aussi affectifs : il favoriserait un meilleur lien
mère-enfant. Du reste l’Organisation mondiale de la santé recommande
l’allaitement complet jusqu’à 6 mois.
Reste que certaines
féministes, telle Élisabeth Badinter, sont plus circonspectes.
L’allaitement aurait aussi de sérieux revers pour la mère : il exigerait
une disponibilité sans faille et, pour le dire vite, nuirait à son
émancipation en la ramenant à sa fonction nourricière. En s’en prenant
en particulier à la Leche League, une association d’origine américaine
qui promeut l’allaitement, É. Badinter a ouvert une véritable « bataille
du lait ».
On aurait cependant tort de voir dans le choix ou non
de l’allaitement un simple choix personnel. Les femmes issues de classes
supérieures sont plus nombreuses à allaiter que celles issues des
milieux populaires. Dans Le Métier de mère (La Dispute, 2010),
Séverine Gojard montre combien les trajectoires sociales jouent un rôle
important sur la réception des prescriptions. Grosso modo, il
apparaît que les femmes des milieux populaires sont plus sensibles aux
conseils provenant du milieu familial. Elles ont souvent déjà eu avant
leur maternité une expérience avec des enfants en bas âge dans le cadre
familial et sont de ce fait plus autonomes par rapport aux
professionnels. Ce n’est pas le cas des femmes des classes supérieures
qui ont une pratique moindre des jeunes enfants et sont plus sensibles
aux normes émises par les médecins, les professionnels de la petite
enfance ou les livres de puériculture. Les unes valorisent l’expérience,
les autres les recommandations des professionnels. Or les grands-mères
valorisent plus facilement le biberon qu’elles jugent commode (d’autant
que le lait maternisé était souvent recommandé à leur époque) tandis que
les professionnels donnent aujourd’hui leur préférence à l’allaitement.
Si ce schéma fonctionne globalement, la réception et le choix des
prescriptions dépendent aussi de nombreux autres facteurs, par exemple
des rapports avec la famille et la belle-famille ou des conditions de
travail… La « bonne mère » est loin d’être un modèle unique. Elle prend
différents visages, variant selon les histoires et les conditions de vie
de chacun.
Pourquoi les Allemandes font-elles moins d'enfants ?
L’Allemagne
a l’un des niveaux de fécondité les plus bas en Europe. Il s’élevait en
2007 à seulement 1,32 enfant par femme. Pourquoi un tel écart avec la
France qui au contraire caracole en tête tout en combinant un fort taux
d’activité des mères ? On invoque souvent les différences entre les
politiques de soutien à la famille. Mais les représentations et les
normes jouent aussi un grand rôle dans les arbitrages faits par les
couples et les femmes en particulier. C’est ce que montre l’étude menée
par Sara Brachet, Marie-Thérèse Letablier et Anne Salles à partir
d’entretiens réalisés en France et en Allemagne de l’Ouest. Les
représentations des rôles masculins et féminins ont une grande
importance. Le modèle familial allemand est assez traditionnel : il est
basé sur une forte spécialisation des rôles. Plus qu’en France, est
ancrée l’idée que c’est l’homme qui doit « faire vivre la famille ». La
majorité des personnes interrogées en Allemagne de l’Ouest estime que la
femme doit, au moins temporairement, s’arrêter de travailler à
l’arrivée de l’enfant. Barbara Vinken, auteure d’un livre sur la mère
allemande (1), rejoint ce constat. « Dans
l’immense majorité des cas, la femme qui devient mère abandonne son
travail et perd son indépendance financière du jour au lendemain. Le
modèle familial est le suivant : le père mène le
combat difficile dans le froid monde professionnel pour pouvoir
entretenir le nid douillet du foyer, dont la mère à la charge… »
Du coup, celles qui mènent à la fois carrière et enfants sont
considérées comme des « mères corbeaux », de mauvaises mères. Pas
étonnant alors qu’une large proportion de femmes diplômées (environ
40 %) ne souhaite pas renoncer à son « investissement éducatif » et
reste sans enfant…
(1) Die deutsche Mutter, Der lange Schattten eines Mythos, Piper Verlag, 2001.
• « Devenir parents en France et en Allemagne : normes, valeurs, représentations »
Sara Brachet, Marie-Thérèse Letablier et Anne Salles, Politiques sociales et familiales, n° 100, juin 2010.
• « En Allemagne, enfants ou carrière, il faut choisir »
Entretien avec Barbara Vinken, Books, n° 24, juillet-août 2011.