Plutôt que la vision binaire entre le bien et le mal de la morale, n'est-il pas préférable d’interroger le problème à sa racine ?
Ainsi
peut-on se demander ce qu’il y a de véritablement étonnant à ce qu’une société hédoniste,
narcissique, fondée sur une concurrence spéculaire acharnée, puisse développer en
aveugle, autre chose qu’un effacement progressif de l’altérité, avec tout le
chapelet des effets secondaires en queue de comète ?
Rapportons-nous
à Paul Ricœur : « Le chrétien et la civilisation
occidentale »,
_
« Les valeurs sont à la vie morale
ce que les racines sont à l’arbre ».
Les valeurs comme fondement de la vie
sociale
Un trait fondamental de
notre existence, de notre condition historique et corporelle, c’est que nous
appartenons à une certaine aventure qui a des contours géographiques et
historiques et qui charrie certaines valeurs ; celles-ci tout à la fois nous
baignent, nous portent, nous limitent, et pourtant ne se soutiennent que par
notre comportement et notre action.
Par
« valeurs », on entend « des vertus privées et sociales, qui sont pratiquées
par une élite ou par la masse, qui sont des jugements, des appréciations, ou
des mœurs effectivement pratiquées, qui sont des sentiments ou des maximes
rationnelles
Au niveau fondamental, l’action obéit déjà à des normes, règles pratiques originaires ou évaluations plus ou moins fortes, au sens où l’agir humain est toujours l’objet d’une appréciation ou d’un blâme.
Au niveau fondamental, l’action obéit déjà à des normes, règles pratiques originaires ou évaluations plus ou moins fortes, au sens où l’agir humain est toujours l’objet d’une appréciation ou d’un blâme.
Les
estimations les plus stables de la conscience collective font déjà partie
intégrante de l’identité personnelle.
Les théories éthiques
supposent que nous sommes toujours déjà préformés par des idées normatives,
c’est-à-dire des valeurs, dans lesquelles nous avons été élevés et qui sont à
la base de l’ordre social. L’ordre du valoir est un « présupposé » ou même un «
a priori » dans la compréhension à la fois de l’action et du sujet.
.. Car « L’ignorance a ceci de particulier, qu’elle n’a ni beauté ni bonté, ni science. Et celui qui ne sait pas ce qui lui manque, il ne peut le désirer »
L’enjeu qui se pose concerne la question de l’altérité.
Le rapport à ce qui est autre, à ce qui est extérieur à soi.
A ce qui ne nous appartient
pas, qui ne nous est pas dû, qui ne nous regarde pas, sur lequel nous n’avons
aucun droit.
Ce qui est refoulé concerne la puissance de la sexualité dont la
frustration misérable est totalement déniée.
Est posé comme acquis un rapport au corps
et au plaisir totalement épanoui et partagé quelques soient les âges, les
milieux sociaux, les cultures, les histoires personnelles.
Se rajoute le déni de la multitude d’outils
de l’image offerts dès la jeune enfance, diffusant les dictats d’une sexualité
brutale sans mesure donnant à voir « ce qu’il faut faire, ou laisser
faire, parce que ce serait ça, comme ça, avec de l’autre à consommer
immédiatement ».
Où
sont les cours d’analyse de l’image, et de l’usage des réseaux sociaux ?
N’est même pas mis en rapport la sexualité
en tant que langage du corps pour dire l’amour qui se fait dans le prolongement
de la parole du poète qui dans le même sens cultive l’aire des mots.
Est non moins refoulé et coulé dans le
bronze, l’accompagnement adulte des professionnels de l’éducation, qui depuis
des décennies, par un même unique cours au collège se contentant de montrer
les organes masculins et féminins de la reproduction, alors que des sites
pornographiques sont à disposition
dans le portable des enfants, dans leurs ordinateurs ou tablettes, qu’ils ont
accès aux réseaux sociaux avec l’ignorance totale du cloisonnement entre
l’intime et le publique grâce à leurs parents inconscients eux-mêmes, qui déjà
les offrent en images à la terre entière depuis leur premier biberon, comme des enfants objets..
En tant que psy, parmi mes patients, je peux dire que 1 enfant sur 3 est victime de pédophilie rien que dans sa famille.
C’est dans ce contexte avec tous les éléments envisagés, que fait sens de poser la question du rapport à l’autre dépourvu d’un étonnement irrecevable si moralisateur, à bien considérer les causes:
L'urgence est d'instruire, c'est à dire d'éduquer à la citoyenneté.
Catherine Catski Durand Cisinski