jeudi, novembre 20, 2014

Qu'est-ce qu'avoir "le diable au corps" ? (KLOSSOWSKI), Jean-Claude DUMO...

Ce que cache le syndrome du sauveur ( article de Pascale Senk )

Ce que cache le «syndrome du sauveur»



























Certains individus se sacrifient et forcent l'admiration de leur entourage. Mais quelles sont leurs motivations profondes ?
«Du plus lointain que je me souvienne, j'ai toujours eu un côté Jeanne d'Arc, confie Carla, 50 ans. Je voulais sauver ma propre mère de son enfance malheureuse qui me choquait tant lorsqu'elle me la racontait, la réconforter d'avoir sacrifié sa vie pour mes sœurs et moi… J'étais comme totalement prise dans cette lignée de femmes “sur-responsables” de la santé et du bien-être des autres.»
Une histoire personnelle qui entraîne peu à peu Carla à n'être attirée que par des amies, des collègues ou des partenaires amoureux mal en point. «Même dans une fête foraine où l'on gagnait un lapin en peluche, je choisissais en priorité le dépoilé, celui qui semblait le plus malheureux!»
Pourquoi pas? aurait-on envie de dire à Carla. Pas question de valoriser l'égocentrisme, si fréquent aujourd'hui. Après tout, ce qui fait la grandeur de l'humain, c'est son altruisme, sa capacité à aider son prochain, sa bienveillance. Certes. Dans les meilleurs des cas, cette tendance donne d'ailleurs de belles vocations de soignants… Et de psychanalystes.
Besoin de reconnaissance

Mais parfois, cette face lumineuse d'une personne, sa générosité et son abnégation légendaires se transforment en source de problèmes et de souffrances, autant pour elle que pour les autres. Les conflits, notamment avec un entourage lassé d'être pris en charge avant même de réclamer quoi que ce soit, se multiplient. «J'ai l'impression que je fais toujours tout pour mes proches, et eux jamais rien pour moi», ne cesse de répéter cette bonne âme.
Cette phrase, fréquemment prononcée en séance de psychothérapie, a tendance à alerter les professionnels de la psyché. Mary C. Lamia et Marylin J. Krieger, deux psychologues californiennes dont l'ouvrage vient d'être traduit (Le Syndrome du sauveur, Éd. Eyrolles), y détectent l'évolution presque systématique de celui qui n'a de cesse de voler au secours des autres: «Au tout début d'une relation, le sauveur semble bienveillant et satisfait de son propre altruisme, mais à mesure que le temps passe, il se montre de plus en plus malheureux, déçu, critique et impuissant», écrivent-elles.

Une souffrance qui a trouvé un nom: la codépendance, désormais prise en charge dans les psychothérapies familiales ou les groupes d'entraide mais toujours pas répertoriée dans la Bible des diagnostics, le DSM 5 (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, publié par l'Association américaine de psychiatrie).
Quelles sont les racines d'un tel comportement? À un premier niveau, elles sont presque évidentes: un besoin de reconnaissance et d'être renarcissisé pousse la personne à voler au secours des autres… Et à le faire savoir. Plus subtile encore, une quête de pouvoir cachée. Quand l'abnégation donne place et importance, pourquoi ne pas en profiter? Le sauveur nourrit, habille, héberge, prend en charge plus fragile que lui… Et, ainsi, il le contrôle totalement.

«Une manière d'apaiser la propre peur de l'abandon qui le mine», estime la psychologue Gene Ricaud-François.
«Enfants parentifiés»

C'est alors un niveau d'explication plus profond qui s'impose. Pour Stéphanie Haxhe, psychothérapeute qui exerce en tant que psychologue clinicienne auprès des familles au Service verviétois d'accompagnement et de guidance, en Belgique, le sauveur a souvent pris ce pli de se faire passer après les autres dès sa petite enfance. Elle a d'ailleurs consacré sa thèse et mené des études de terrain pour cerner cet «enfant parentifié» (titre de son livre paru aux Éditions Érès).
«C'est celui qui a dû se concentrer sur les besoins des adultes avec qui il vivait: une mère fragile psychiquement après une rupture, ou anorexique, un père alcoolique l'ont installé dans ce rôle de pourvoyeur de soins, explique-t-elle. Il est donc devenu à son insu l'adulte de la famille.»
Au fil des années, ses besoins n'étant jamais sa priorité, il recherchera un partenaire qui a besoin, lui aussi, de soins. Une formule qui, le plus souvent, ne peut fonctionner bien longtemps. «La difficulté majeure de ces personnes programmées pour prendre en charge l'autre, c'est qu'elles ne savent pas s'abandonner, explique Stéphanie Haxhe. Elles n'ont jamais été enlacées dans des bras qui les rassuraient, et ce qu'elles réclament à l'autre, c'est la part d'amour infantile qu'elles n'ont jamais reçu. Une quête insatiable, forcément.»
Ces «enfants parentifiés» sont heureusement de plus en plus souvent repérés par les services sociaux, et un travail thérapeutique en famille peut alors être envisagé. Pour Clara, le fait de devenir mère a rééquilibré un peu sa tendance naturelle à prendre en charge les autres. «Avec deux garçons à éduquer, j'ai déjà pas mal à faire dans mon escarcelle», confie-t-elle avant de citer un autre signe de progrès selon elle: «J'ai de nouveaux amis qui vont bien et n'ont pas besoin de mon secours… Ça veut certainement dire que je vais mieux!»

Le langage comme manipulation de la réalité (article de de Michel Levy)

Même et particulièrement en amour : "peut-on ne pas manipuler ?" ( article de Michel Levy) Cette phrase apparemment obscure signale simplement que les mots ne sont pas les choses, espace crée par l’entrée dans l’altérité et l’effet signifiant du langage. Il ne s’agit pas d’autre chose dans le noeud du mouvement surréaliste, illustré par le tableau de Magritte montrant une pipe, et qui s’intitule “Ceci n’est pas une pipe”. Ce qui est strictement vrai, puisque le tableau n’en est que la représentation, comme les mots ne sont que la représentation des choses.
Prendre les mots pour la réalité, pour les choses, est une tentation bien humaine, liée à notre désir que l’autre soit notre sauveur, notre guide, notre grand autre en langage lacanien.
S’il est donc un mensonge inaugural dans le langage, c’est de le prendre pour le monde alors qu’il ne fait que le représenter. La sortie de la réalité existe donc dès que le langage se pique de vérité.
Si cette distance est au coeur du langage, et fonde l'imaginaire individuel et social, sous la forme de l’image de soi et des mythes il est un point où mensonge et manipulation affectent directement la santé psychique à la fois d'un sujet ou d'un groupe : en accommodant l'imaginaire avec le réel, il arrive qu'on s'éloigne trop, alors, de l'authentique de l'être, de la société. Alors, ces mensonges deviennent des machines à névrose et autres psychoses individuellement, ou générateurs de troubles sociaux. Si les représentations individuelles et collectives sont toujours distance du coeur de l’être ou du social, mieux vaut que cette distance ne soit pas abîme.

La difficile division du sujet

Il s’ensuit que l'être humain n'a pas le choix, il est soit dans le délire s'il est dans la vérité, ou dans le désir s'il habite l'altérité. Ainsi s’éclaire l’aphorisme de Lacan, dont la clarté peut échapper au premier abord ! On comprend alors la constante tentation du délire, et la difficulté permanente du désir. Car si le délire est une évacuation de la réalité, le désir en est la manipulation.
Le passage de l'un à l'autre, toujours à reprendre, est ce que la psychanalyse a isolé sous le nom de castration.
C'est sa difficulté constante, sa réinvention continuelle, ses dénis, refus, rejets qui donnent prise à la manipulation continue des êtres les uns par les autres.
Le délire et la vérité sont une seule et même chose, puisqu'en effet ce qui limite le trait psychotique est ce qu'on appelle la castration, à savoir que notre toute puissance (autre nom de la vérité) s'arrête là où commence celle de l'autre. Cette nécessité de la présence de l’autre sexe pour que l’instinct le plus puissant, celui de la reproduction, se réalise, fait jouer un paradoxe chez l’humain comme chez tous les animaux sexués: l’autre est aussi ou plus important que soi. Que ceci se symbolise sur ce qui s’aperçoit de la différence des sexes est alors le propre du plus ancré dans le symbolique des animaux, l’homme. Voilà pourquoi la castration, ce sacrifice partiel de soi, reste à une place centrale et éminente chez l’humain, ritualisée et symbolique. Elle est, fondamentalement, un renoncement à la toute puissance de l’instinct, au bénéfice d’une altérité bénéfique.
Voilà aussi pourquoi elle va être niée, refoulée ou projetée par nombre de ceux chez lesquels la découverte de l’altérité fut aussi celle du traumatisme. S’ouvre alors le vaste champ de la manipulation de la réalité, pour autant que pour ceux-là, le passage obligé par l’autre sexe fait horreur, faisant place alors au risque d’un narcissisme tout puissant, plus ou moins partiel, plus ou moins morcelé, déclinant alors sa gravité selon l’axe névrose, perversion et psychose#.
Si j’en fais une lecture plus extensive, la psychanalyse freudienne a cependant plus précisément dénommé perversion cette inclinaison humaine du déni de la différence sexuelle, universelle chez le jeune enfant en train de découvrir cette limite à sa toute puissance, et en trace plus ou moins forte chez chacun d’entre nous. C’est que le paradoxe reste toujours présent, entre l’intérêt de la présence de l’autre et notre désir d’être complètement et totalement nous-même...
C’est que celui qui se soutient de la vérité n'est plus dans l'altérité, et réciproquement.


La manipulation comme «solution» à cette division

Une autre façon d'aborder la question fait appel à Platon et son mythe de la caverne. Autant les ombres que nos sens aperçoivent ne sont que les lointains échos des objets réels hors de notre portée, autant les mots ne sont que les distantes représentations des choses.
De ce fait, constamment, qu'on le veuille ou non, on manipule et on est manipulé, comme l'ombre chinoise l'est par la main. Nous sommes les objets les uns des autres comme de la réalité, suivant nos pauvres désirs humains, dans des représentations du monde qui nous l’éclairent et nous le cachent en même temps, comme le dit Edgard Morin. Nos constructions symboliques ont toujours au moins une face cachée, elles sont toujours Dr Jekyll et Mr Hyde, le Dr Folamour n’est jamais loin d’Einstein.

Si le terme de manipulation a deux sens, c’est que la langue est maligne, comme toujours : on est influencé, bougé, bousculé, changé par l’autre, ses désirs et ses mots, donc manipulé par lui, au sens du kinésithérapeute. Pris dans les mots comme dans les bras, sans totale maîtrise ni pouvoir de contrôle absolu ! On voit que la confiance est le pendant de la castration, elle en est même le moteur principal! Si on doit être manipulé par les mots de l’autre, mieux vaut avoir confiance en lui.

Or, on l’a vu, il est différents rapports des mots au réel : un qui reste fixe, faisant des mots un univers virtuel parallèle proprement délirant, et dont le décalage au réel pose des problèmes aboutissant vite au symptôme, voire à la violence. Un autre, où entre l'authentique de l'être, de l'autre, du monde et leur représentation dans le langage, un remaniement constant fonctionne, faisant à la fois le vivant de la langue et de l'être. C’est ce qu’on appelle génériquement le doute, l’humilité. Ce qui, contrairement à une certaine mode, ne signifie pas pour autant que rien ne vaut rien, mais engage la confiance plus du côté de celui qui cherche, se questionne, que vers celui qui affirme, sait. À défaut d’un miracle, on trouve alors un chemin...


La tentation d’être manipulé

Mais beaucoup demandent plus qu’un chemin...On comprend alors que pour eux ne pas être guidé, c'est être trompé, à savoir dans l’attente profonde d’une solution toute puissante. C’est bien ce que l’enseignement du Dr Knock nous apprend, et c’est à cet endroit que bien des patients manipulent les médecins vers l’illusion de la toute puissance imaginairement salvatrice.
Le succès de Knock et du Dr House, qui se ressemblent beaucoup, tient au fait qu'ils ne sont pas aimables, mais tout puissants... Car être gentil, humble et aimable, ce n’est pas être dans la vérité, ce n’est pas réduire systématiquement la part d’indéterminé de l’humain à une séméiologie toute puissante, ce n’est pas injecter constamment du sens face à la question de l’indéterminé du corps et du désir. Cette coagulation entre les projections d’un gourou et les attentes de beaucoup d’une croyance rassurante ont en fait le même résultat, faire revenir le spectre de la mort plus tôt qu’à son tour. Qu’enfin ce qu’on craint, refoule, met à l’écart ait un nom, une présence, une fonction, une parade ! Plus fort que la mort...

Il faut noter que la manipulation de Knock passe justement par la compétence technique, lui qui ne se trompe guère de diagnostic en réalité, et est effectivement fort moderne dans ses théories de la santé. La maladie, selon lui, et donc Canguilhelm, ne serait qu’une variation de la norme, la prévention est la seule vraie médecine, la santé n’est qu’une apparence qui peut jouer plus d’un tour si on y croit trop, si on se croit trop fort et immortel, etc..
Même ses diagnostics sont à priori “justes”! Le célèbre “Ca vous gratouille ou ça vous chatouille” abouti à un réel diagnostic de gastrite alcoolo tabagique avec les prescriptions (il est vrai très aliénantes!!) qui y sont liées. La façon aussi dont il retourne l’humble science médicale représentée par le bon et honnête Dr Parpalaid, qu’il transforme illico en malade, en convoquant le spectre de la mort, pour emporter l’adhésion de tous ceux qui ne veulent pas mourir, est aussi médicalement pertinente : imprudent sans doute de refaire de suite 8 heures de voyage à l’âge de cet éminent docteur.
Sauf que, Knock, comme il le dit lui-même, ne peut se regarder dans la glace. Pas d’altérité pour lui, pas d’autre voie que la psychose pour lui, ici psychose paranoïaque qui s’exprime dans la description qu’il fait des 250 thermomètres, qui, au même moment, vont plonger ensemble sur son ordre dans 250...

Alors, la leçon de Knock est celle-ci : si on est vrai avec l'autre, on le trompe, si on le manipule, on est malhonnête, si on est authentique et gentil, on trompe son attente... et si on est honnête et humble, on n’a pas sa place dans cette pièce de théâtre ! Mais qu’est être honnête, s’il est impossible de ne pas manipuler, soit le réel avec les mots, soit l’autre avec son désir ? Dire la vérité, c’est manipuler le réel en faisant artificiellement coller les choses et leurs représentants. Mentir, c’est manipuler l’autre dans un but pervers plus ou moins grave. Dire la vérité et mentir à la fois comme Knock, c’est instituer un gourou et créer une secte, ce que devient le village dans la pièce de Jules Romain.
La manipulation psychique se veut alors universelle, le pire étant la bonne âme qui croit vouloir le bien d'autrui. Il n'est ainsi pas certain que l'Afrique se soit encore remise des exploits des missionnaires et autres pacificateurs. Leurs échecs plus massifs sur le continent asiatique ayant garanti à celui-ci un développement plus harmonieux, plus authentique et singulier.
C’est que comme dans la pièce de Jules Romain, le vrai but était d’abord et avant tout l’argent, forme de perversion somme toute tellement banale qu’on en oublie qu’elle en est une, et de taille.


Quelle issue à ces logiques contradictoires?
Vouloir le bien, c'est d'abord le définir comme vérité pour l'autre, et c'est là que le bât blesse. Il existe, bien entendu, un bien commun, une morale commune, une loi, des us et coutumes, un code civile, et in fine une langue et toutes ses traditions orales et écrites. Nous en partageons ici un certain nombre, qui sont les élaborations de la médecine, de la psychanalyse, des sciences en général. Mais ce bien commun n’est pas le bien de l’autre, il est simplement le socle qui nous permet de nous parler. Posons clairement le paradoxe qui émane de tout ce qui précède : parler vrai, c’est alors dire que l’on ment. Sortir du paradoxe, c’est se rendre compte que parler, ce n’est pas parler à quelqu’un, c’est parler au langage. On manipule alors les mots, pas les êtres. Dès lors quelque chose peut être vrai pour la logique de la langue, sans pour autant s’étendre à la logique de l’être. S’il est impossible de ne pas manipuler, au moins peut-on explicitement s’en tenir à la manipulation des mots. C’est à quoi servent les ajouts fréquents dans les échanges entre personnes modestes, tels que “Ce n’est que mon opinion”, ou “voilà simplement mon point de vue”, etc. Ils signalent que le jeu de manipulation langagier peut se poursuivre, indépendamment de ce qui vient d’être affirmé avec parfois la plus grande force. Ils libèrent (partiellement) l’être de la pression du langage... sans néanmoins l’exonérer de celle de la présence et de son poids affectif et instinctuel.
Si on n’aperçoit pas ce décalage, la violence suit vite, le forçage de l’être par la langue étant donc la plus commune, la manipulation pathogène la plus banale, largement pourvoyeuse de pathologies variées. C’est à quoi aboutit aussi la réduction actuelle de l’humain à de la technique, que ce soit celle du management, de la génétique, de l’éducation, etc.. La manipulation survient même alors lorsqu’on veut appliquer sa technique sur un patient qui vient pourtant expressément nous voir pour qu’on le soigne... C’est que l’idée du soin n’est pas la même pour les deux protagonistes. Cette idée est connue et largement travaillée dans les groupes Balint.
Ce qui l’est peut-être moins est le point suivant. Pour que la manipulation des êtres cesse, encore faut-il qu’ils aperçoivent leur complexité contradictoire, mutuellement, ce qu’ils ne peuvent faire que dans le questionnement de leurs erreurs réciproques, en constatant donc que leurs savoirs mutuels sont manipulables. C’est là que le bât blesse le plus souvent, la tentation d’exister avec l’autre écrasant la distance des savoirs qui jouent alors les uns contre les autres, au lieu de se remanier mutuellement. C’est qu’il est deux partenaires, toujours, celui qu’on se représente, et celui qui est vraiment ! C’est ce deuxième qui va faire obstacle à nos désirs, et va de ce fait être l’objet de manipulations conscientes ou inconscientes, afin que notre savoir reste “intact”. Souvent, la plus courante de ces manipulations va être la tentation de parler à un tiers commun des résistances que nous oppose un sujet à ce qu’on veuille son bien ! Tel médecin va alors, en l’absence du patient, parler à la femme de l’alcoolique, tel psychiatre va proposer qu’on surveille un patient suicidaire, etc. Le résultat ne se fait pas attendre, sous forme d’aggravation du symptôme en règle, voire de suicide réussi. Je me souviens ainsi de l’exposé d’une expérimentation de psychothérapie de groupe faite par des collègues d’Europe de l’Est à propos d’alcoolisme. Le patient était vu, puis sans lui sa famille, ses collègues de travail, ses amis, bref, tout son lien social, afin de réfléchir à son problème d’alcoolisme. Les résultats de cette études comportementaliste étaient semble-t-il excellents dans l’ensemble. Je suis allé parler ensuite à ces collègues, qui ont pu me dire en off qu’en réalité, la plupart des sujets traités furent ensuite victime de phobie sociale, ce qu’ils n’avaient pas indiqué dans leur intervention ! C’est qu’on oublie trop souvent que pour le patient, un symptôme psychique, contrairement au symptôme physique, est tout autant une solution qu’un problème. C’est une résistance de l’être à l’étant, de l’être pour soi à l’être pour l’autre, entre les mots et leurs représentés, entre les concepts et les affects. S’il témoigne d’un espace par trop douloureux, contradictoire, entre les mots et les choses, il vaut mieux ne jamais oublier qu’il est aussi un espace de constante élaboration.

Conséquences pour le symptôme psychique :
Dès lors, en pathologie psychique, supprimer un problème pour quelqu’un, c’est aussi lui supprimer l’élaboration d’une solution. Ce que dit bien ce proverbe chinois qui soutient que le pire qu’on puisse faire à l’humain est de lui expliquer ce qu’il pourrait trouver lui-même. La résistance à la manipulation, même thérapeutique, n’est en fait que le temps de l’élaboration de cette solution propre à l’être, et qui de ce fait n’est ni l’affaire de la conscience, ni l’affaire du médecin, ni réductible à une logique technique ou langagière. Ceci rend compte d'une observation personnelle, qui me laisse penser que les techniques comportementales employées de façon trop rigides et donc manipulantes, si elles ont des résultats sur le symptôme, provoquent finalement pas mal de dégâts collatéraux, dont peut-être des suicides. Comme ces cas sont sortis des études soit-disants probantes, pour le moment on ne sait si ce soupçon grave est justifié. Il peut en tout cas se déduire en raison de l'impasse sur le lent travail des résistances, patient labeur de restructuration, résistance à la manipulation thérapeutique, au mensonge de guérison : on ne guérit pas de l’espace entre les mots et les choses, entre les espérances et les réalités.
Aussi le symptôme n’est-il négociable par aucune manipulation, et la résistance n’est que le signe de cela, que l’être du patient est véritablement dans son temps et sa logique propre pour avancer dans sa vie et ses symptômes.. Ce qui ne peut être le temps et la logique du médecin ou d’un autre manipulateur, analyste, psychothérapeute, superviseur ni même la logique d’un groupe, fût-ce un groupe Balint...
L’inconnaissable, l’absolue singularité du sujet, l’infinie profondeur et complexité de l’être sont en fait les réelles limites de toute manipulation. Et pour nous, médecins, ce qui contrarie notre désir thérapeutique est souvent plus enrichissant que ce qui s’y plie, savoir qui peut nous permettre, parfois, de supporter de nous apercevoir manipulateurs, afin d’en stopper à temps la pression délétère.... C'est ce que les psychanalystes appellent le travail sur le transfert, lequel peut ici se définir comme la part inconsciente de la manipulation.

Vignette clinique : il a 25 ans, et une aggravation complètement invalidante (il est en arrêt de travail) d'une névrose obsessionnelle, avec lavage des mains et diverses craintes hygiéniques, se manifeste depuis un an, mais évolue depuis 6 ou 7 ans... Il vient me voir, et guérit complètement au niveau symptomatique en trois ou quatre séances! A peine ai-je le temps d'un inflation très bling bling de mes capacités d'analyste qu'il m'annonce que, décidé à guérir, il voyait en même temps un psychologue psychothérapeute, un psychiatre cognitiviste et un psychiatre prescripteur de Seroplex, sans compter le généraliste !!! Dès lors, à qui le pompon ? En tout cas à lui, le manipulateur, qui va étonnamment vite et mieux. Une nuance, et de taille : la manipulation ici n'est pas longtemps perverse, elle est vite dite et assumée ouvertement, sans mensonge trop durable...
Alors, en fin de compte, peut-on ne pas manipuler ? Il faudrait pour cela que la relation humaine puisse être totalement consciente des deux côtés, dans une indépendance d’esprit totale de part et d’autre, sans aucune place à un quelconque inconscient. Ce n’est pas la vision de la psychanalyse.
Il s’en déduit ce paradoxe central qui tient au fait que si on répond oui, on peut ne pas manipuler, on est, on l’a vu, en grand risque de manipulation consciente ou inconsciente de l’être de l’autre, alors que la réponse négative, elle, laisse sa parole et son choix à l’autre. Il est des limites au soin, au soulagement, et même à l’amour, elles sont ce que notre imprévisible interlocuteur en pense et en dit.

Il vaut mieux savoir que dès qu’on parle, on opère sur une fiction où l'éthique peut alors se convoquer, si on se sait mentir ou manipuler ou simplement se tromper, quoiqu'on fasse et qu'on dise, puisque c'est un fait de langage, et que c’est même pour cela que le langage est fait..

Heureusement, reste donc le silence et l’écoute, qui, eux, ne sont pas toujours de l’ordre de la manipulation et du mensonge… Même s’ils sont des outils de connaissance, en particulier dans la psychanalyse, ils n’orientent pas toujours vers un objet précis lié au désir singulier de celui qui se tait.


Conclusion : une belle et aimante manipulation

Nous avons vu que la confiance en l'autre est la condition forte de l'altérité. Elle est donc naturellement une des conditions fortes, aussi, de la manipulation, et l’humain n’est pas près de sortir de ce paradoxe.
Qui manipule qui n’est alors pas toujours facile à déterminer. Le savoir est probablement la seule parade possible. Voici une petite histoire, de ma famille, pour illustrer cela.
J’avais une arrière grand-mère fort gentille, ancienne institutrice, raconteuse d’histoire, comme celle de l’homme qu’elle a rencontré et qui avait connu Napoléon 1°...
Bref, un espace de transmission et de rêve, très disponible à ses arrières petits enfants, dont elle se rappelait les prénoms sans problème à près de 97 ans. Bon, pour le reste, elle perdait bien un peu la tête. Son seul défaut : elle avait un peu trop l’habitude de jouer ! A la loterie, aux courses, etc... C’était son plaisir, mais qui coûtait cher à la famille, rentrée d’Algérie en 62, ayant tout perdu, et vivant des subsides de ceux des enfants et petits enfants en âge de travailler.
Alors, une aimable manipulation fut décidée par la famille. Comme elle ne voyait plus beaucoup, un oncle lui remit chaque semaine quelques feuillets d’un vieux carnet à souche, en guise de loterie, à la place de ceux qu’on allait lui acheter chaque semaine. Tout allait bien.
Mais qui eut l’idée alors de lui faire l’immense plaisir, en cette fin de vie, de l’informer qu’elle avait gagné le gros lot ? Ce qui fut fait, et annoncé. Elle était folle de joie, et gagna en gaieté pendant quelques semaines, son billet dans la poche de sa robe de chambre.
Puis, un jour, à table, elle fit tinter son couteau contre son verre, et obtint ainsi le silence. Alors, elle tint ce bref discours : “Mes enfants, je voulais vous parler de l’évènement que vous connaissez. Ce gros lot que j’ai gagné, et que voilà dans ma main, et bien... je vous le donne !”


Moralité : impossible donc de savoir qui manipule qui, si on parle un vrai dialogue humain, fondé ici sur l’amour.

vendredi, décembre 27, 2013

Cet "amour de symptôme"...


A quoi sert le symptôme  en tant que « saint-homme », 
si on ne lui délègue  le pouvoir de parler à notre place 
de ce qu’on a à dire.
Il est inattaquable puisqu’en lui, tout nous échappe. 
Il n’est pas volontaire. 

          Du coup, ce n’est pas notre faute.
De ce fait, le symptôme,
 au même titre que le rêve,  rend service.
Il dit « je vous emmerde » ou bien :
_ « vous ne m’aurez pas comme ça, voyez, 
je suis ailleurs et je ne peux pas être ou faire mieux».
On délègue au symptôme notre pleine puissance à jouir d’une résistance, désencombrée de  la moindre culpabilité..

     Le symptôme dit comment et de quoi on jouit.
      C’est en cela qu’il est si précieux et qu’on y tient.

Il fait exister ce à quoi on ne renonce pas, une forme de résidus têtu qui réfléchit une sainteté, justement à l’endroit de notre culpabilité la plus ancrée.
Une dualité de principe, s’instaure :
D’un côté, on se rend coupable de résister via le symptôme.
En même temps, en le laissant parler à notre place, on devient l’innocent de qui tout s’échappe involontairement.
Enfin, quelque part,  c’est pratique, quoi !

De là à construire son identité sur cet échappatoire, 
il y a un pas qu’on franchit aisément vers autrui, qui doit porter de ce fait, ce qu’on lui dépose de visu. Et là, coupable ou pas, ça fait jouir !

C. Cisinski

vendredi, octobre 11, 2013

Comment ça va ?



L'Être joyeux en bonne santé, 
n'est pas tant celui qui a éliminé de lui-même ses contradictions : c'est celui qui les utilise et les entraîne dans son travail, en pleine lumière.
De fait exerce-t'il quant à lui, un sentiment de puissance d'être au monde, 
une forme de plénitude de s'éprouver ainsi rassemblé au coeur de sa tâche, 
tenant sa promesse d'homme.

La liberté d'être soi ne consiste donc pas à délirer la rupture des liens et influences diverses et prégnantes.

La liberté se loge dans la connaissance de notre carte routière intime traçant tout ce qui nous gouverne, afin d'en user en pleine conscience et de le transformer au sein de notre ouvrage.

"Résilience" est "l'appellation moderne" d'un tel principe vivant. 

mercredi, octobre 02, 2013

Cette ignorance que nous avons de nous-mêmes...

La maladie est l'ignorance que nous avons de nous-mêmes, 
de ce que nous sommes vraiment.
La maladie dit qui nous sommes.
Elle se déclare à l'orée de l'insu - portable.

Comment envisager de sortir de cette ignorance ?
Chacun est en chemin.
Le thérapeute est celui qui accompagne
une personne sur son propre chemin.
Pas plus. 
Pas moins.


Bon pour rappel... Kant et Nietzsche


« Messieurs, soyez appliqués,
instruisez-vous, car si nous étions
trop nombreux, il n’y aurait pas de pain pour tout le monde. »
(Observations du beau et du sublime)      Kant.


















 « Ne faut-il pas en effet qu’il y ait
des choses au-delà desquelles on danse
et que l’on franchit en dansant ?
Pour l’amour même des êtres légers ,
Plus légers qu’un souffle,
Ne faut-il pas qu’il y ait aussi
Des temps et des nains pensants ? »
( Ainsi parlait Zarathoustra )          
 Nietzsche




samedi, septembre 14, 2013

Réalisations d'une petite fille d'origine africaine âgée de 5 ans




pyrogravure & peinture réalisée par une malvoyante.




















Comment ?
Sous l'effet d'une dictée des repères aussi simples que "gauche" droite""...
Dans un rapport de confiance absolue mis en place durant l'enfance.

Profil de la personne atteinte de perversion narcissique ( article de V. Lepesqueur )




Le profil de la personne atteinte de perversion narcissique
Son premier moteur, c’est l’envie. Ce qu’elle veut, c’est ce que possède l’autre ou qu’il semble posséder, au sens propre comme au figuré. Elle veut d’abord ce que l’autre est mais aussi ce qu’il a ou ce qu’il fait. Comme elle ne peut structurellement se satisfaire, elle va chercher à dénigrer, salir, humilier, détruire. Car son second moteur est la haine : elle ne supporte pas de voir l’autre heureux et libre. Faire souffrir l’autre est une manière d’échapper à sa propre souffrance, c’est aussi une jouissance à part entière. Il n’y a pas de « bonne manière » de se défendre car si l’on résiste, elle devient enragée et si on ne réagit pas, elle hait souvent férocement.
Ce qui caractérise les personnes atteintes de perversion narcissique, ce sont les traits de caractères ou les fonctionnements suivants :
. l’intelligence : en effet, ce sont des personnes très souvent d’un bon niveau culturel, dotées d’un sens aigu de la psychologie, ce qui leur permet de savoir parfaitement faire faire ou faire dire à l’autre ce qu’elles ont envie qu’il fasse ou qu’il dise …
. la mégalomanie : ce sont elles « les plus belles », « les plus intelligentes », « les plus fortes », leur orgueil est sans borne et leur mépris pour les autres est grand ; elles peuvent montrer un certain respect pour des personnes qu’elles estiment supérieures à elles ; dotées d’un bon esprit stratégique, elles font tout pour atteindre leur objectif et sont prêtes à tout pour ne pas perdre, en se moquant de la morale, au contraire : leurs stratégies les menant souvent à la victoire, elles se persuadent qu’elles ont raison de se conduire ainsi ; recherchant passionnément l’attention, le devant de la scène, elles vont critiquer insidieusement les autres pour mieux se faire valoir,
. l’égoïsme et l’égocentrisme : tout tourne autour d’elles, tout leur est dû ; elles ne supportent pas la contrainte, la contradiction, le refus … elles ne prennent pas l’autre en compte puisque l’autre est « chosifié » comme elles le furent dans leur enfance, elles sont incapables d’empathie, sauf simulée quand il s’agit de servir leur intérêt ; elles n’ont que peu d’affect, peu d’émotions et de sentiments, elles ne s’intéressent qu’à elles ou lorsqu’elles s’intéressent à certaines activités, certains projets ou certaines personnes, c’est de manière superficielle et provisoire, elles gardent toujours une certaine distance entre elles et les autres et sont incapables de nouer une véritable relation avec l’autre,
. le mensonge, voire la mythomanie : c’est logique puisque ces personnes sont intérieurement dans la peau d’un autre, elles jouent un rôle, elles ne sont jamais elles-mêmes, elles ne savent pas être elles-mêmes, elles ne le peuvent pas et c’est bien ce qu’elles envient chez l’autre ; habilement, elles mêlent la vérité et le mensonge, feignent, trompent, simulent, et parfois croient sincèrement à leurs mensonges ; comme elles cloisonnent habilement leurs différentes relations,  personne ne peut recouper les informations ; elles sont parfois conscientes de leurs mensonges, parfois non ; elles ne reconnaîtront jamais rien, s’entêteront malgré l’évidence, voire seront dans le déni ;
. leur discours : elles ne parlent jamais précisément, ne disent pas directement ce qu’elles ont à dire, mais font des sous-entendus, des allusions, … ce qui leur permet ensuite de nier, d’affirmer que c’est l’autre qui a mal compris, mal entendu ou qui ment !  Si l’on s’aperçoit de leurs contradictions, elles vont trouver un moyen de s’en sortir et vont affirmer, par exemple, qu’elles plaisantaient ; elles transmettent des messages paradoxaux, afin de semer la confusion, ce qui leur permettra de critiquer, de reprocher, de rabaisser ; elles passent très facilement de l’admiration au mépris : elles valorisent pour mieux dévaloriser, ce qui déstabilise leur interlocuteur qui ne sait plus quoi penser et qui va généralement les excuser en mettant leurs paroles blessantes sur le compte d’une mauvaise humeur ou de soucis … la plupart du temps, on leur pardonnera beaucoup car elles savent se montrer si aimables, si gentilles, si attentionnées …
. l’abord : quand on les rencontre, ces personnes paraissent généralement sympathiques, cordiales, extraverties, brillantes et l’on perçoit généralement tout de suite leur intelligence … comme elles sont fines psychologues, elles savent très bien manipuler afin de remporter l’adhésion de leur entourage,  et contrairement aux « simples pervers » qui provoquent très vite l’hostilité par leurs revendications et leur façon de nier l’autre, elles savent très bien se rendre sympathique, jouer l’empathie, la compassion, etc. ;
. la paranoïa : leurs duperies, mensonges et  tromperies peut mener ces personnes à être secrètes, sur leurs gardes, suspicieuses, hyper-sensibles et à voir des « ennemis » partout ; dans ce cas, loin de les abattre, cela décuple leur combativité,
. l’esprit de vengeance : un état d’esprit mesquin, rancunier et très jaloux les pousse à de vraies « vendettas », à harceler, ou à faire des choses totalement incongrues, bizarres, et qui provoquent l’incompréhension, la perplexité, dont elles jouissent en secret et qui va parfois jusqu’à révéler une part de leur personnalité qu’on n’imaginait pas ;
. le sentiment d’irresponsabilité : bien qu’elles soient responsables pénalement parlant et, d’après certains psychanalystes, parfaitement conscientes de leurs actes, ces personnes ne se considèrent jamais comme responsables (« c’est pas ma faute »), ne se remettent jamais en question, et reportent toujours l’erreur sur l’autre, en particulier lors de la phase de séparation où elles vont se faire passer pour la victime, ce qui leur permettra de séduire à nouveau une personne compatissante qui voudra à nouveau « les sauver » ; elles aiment également se faire plaindre, s’inventer des maladies, ou tirer profit d’une maladie réelle ; en outre, elles considèrent qu’elles auront plus à perdre en changeant (même si elles laissent croire le contraire) qu’en restant comme elles sont … dans ces conditions, il est difficile pour elles de faire appel à un thérapeute et quand, poussées à cette démarche, elles se décident à consulter, le thérapeute sera forcément « incompétent » ; de même, il leur sera très difficile, voire impossible, de changer de fonctionnement,
. le « phagocytage » : comme je l’ai dit plus haut, ce que veulent absolument s’approprier ces personnes, c’est l’autre : ses qualités, ses idées, ses passions, ses envies, … bien plus que ses biens, ce qui fait que, parfois, une fois qu’elles ont obtenu ce qu’elles voulaient, elles rejettent tout d’un coup celui ou celle qu’elles admiraient peu de temps auparavant ; ces personnes ne peuvent pas connaître les limites entre elles et l’autre, puisque l’autre est utilisé comme un reflet d’elles-mêmes, ce qui induit une confusion des limites entre elles et l’autre et cela les mènent à s’attribuer les qualités de l’autre, tout en les lui déniant, et inversement : elles reportent sur l’autre leurs propres défauts, l’autre n’est donc considéré que comme un double, et les différences sont gommées, niées, …
. l’emprise : les personnes atteintes de perversion narcissique ont besoin de l’autre pour exister, et en particulier d’un autre ou d’une autre sur lequel ou sur laquelle elles jettent leur dévolu et qui est choisi(e) pour être, entre autres, un faire-valoir ; en effet, grâce à l’autre, ces personnes vont pouvoir s’admirer, être valorisées, être confortées dans leur narcissisme permanent ; elles vont donc mettre en place un processus dont le but est essentiellement de supprimer la pensée critique de sa victime, cela passe d’abord par la séduction, puis la déstabilisation, la confusion, l’isolement et la peur, notamment ; et c’est d’autant plus facile que la victime (en raison de son propre fonctionnement) culpabilisera d’abord, cherchera des circonstances atténuantes, excusera, portera la responsabilité, … et finira par ne plus avoir aucune confiance en elle, doutera de ce qu’elle entend, de ce qu’elle voit, et même de ce qu’elle dit, et tombera dans la dépression ; pour atteindre son but, son agresseur fera en sorte de l’isoler de son entourage familial et amical et veillera à ce que les maltraitances aient lieu dans l’intimité, de manière cachée et rarement devant un public quelconque ; une fois la proie « ferrée », elle ne pourra plus se détacher que très difficilement, souvent pas avant des années, avant de prendre conscience de ce qui s’est réellement passé ; et c’est au moment de cette prise de conscience, quand elle commencera à se rebiffer, à répondre, à contester, à protester que son agresseur lui fera sentir toute l’étendue de sa haine, qu’il reportera également sur tous ceux qui se mettront en travers de son chemin …
Les solutions ?
D’après ce que j’ai pu lire, il n’y en a pas vraiment, ou il y en a une seule : partir. Compte tenu de leur fonctionnement et comme on l’a vu, les personnes atteintes de perversion narcissique sont incapables de se remettre en question et donc de prendre conscience de leur trouble. Or, les victimes ont beaucoup de mal à partir, d’abord parce qu’elles sont sous le coup de l’emprise, ensuite parce qu’elles sont complètement laminées. Elles ont vraiment besoin d’être aidées, accompagnées, soutenues, informées …
Valérie LEPESQUEUR

vendredi, août 02, 2013

Utiliser autrui ou de la perversion narcissique, Christophe MEIGNANT

L'art est ami.

La pratique d'un art est naturellement une catharsis.
Elle s'opère par le franchissement d'une porte comme celle d'Alice, pour se refaire, comme le joueur qui risque encore et encore sa chance de réparer, de reconstruire sa mise.

L'artiste ne se sent pas différent de ceux à qui il donne à voir ou à entendre ce qu'il crée. Simplement, il connaît cette sorte de transe momentanée qui ne lui ôte ni la clarté de sa vision, ni la sûreté de son trait, mais le répand au-delà de lui-même, dans un abandon que recueille sa toile et qui fera d'elle ce que d'autres appelleront "une oeuvre".
Lui ne sait pas que c'est une oeuvre.
Il sait juste que ce qu'il a éprouvé est sans mesure,n'a point de nom,ne supporte aucun commentaire. Il a suivi un souffle qui passe fécond, et s'éloigne.

Qu'il soit peintre, poète, sculpteur ou musicien ne change rien à l'expérience créatrice en son fond. C'est bien pourquoi le peintre peut passer à l'écriture, philosopher ou décider à tout moment de son parcours, de s'approprier les outils qui l'inspirent.

Les arts sont des dialectes d'une même langue originelle et silencieuse, mais qui parle toujours au coeur de l'oeuvre.

L'art-thérapie est un espace transitionnel, le champ d'accueil en extension des thérapies classiques, où les mots proviennent de l'expérience créatrice, installent des balises, des bouées, des repères.
L'art-thérapie réfléchit une sorte de carte intime, renvoie de visu, le tracé d'un fonctionnement qui se lit, s'entend, se donne à voir.
En ce sens, la parole déployée se matérialise, incarne l'identité du sujet qui s'interroge et dans l'acte, se reconstruit, se refait donc, comme sur un tapis vert.
A suivre....


vendredi, février 22, 2013

Les processus créatifs en bonne santé

L’artiste fait acte de défier ses retranchements.

Il déclare la guerre à ses résistances.


Il s’arme contre toute inhibition.


Il défait l’organisation de tous ses fonctionnements,
pour rebâtir, en l’élargissant perpétuellement,
la place d’accueil à ce qui advient.

Il joue à renaître sans cesse de ses cendres.
Il risque l’extrême équilibre
de sa souplesse intellectuelle et psychique,
grâce à la force aveugle car inconséquente
de son imaginaire,
à cause d’un déterminisme autoritaire
qui le précède et décide de chaque instant.

Ceci est le processus sain, car constructeur,
de l’activité créatrice, voire subliminale
qui consiste à se risquer dans son champ de parole,
en vue d’y faire croître sa propre langue.

                                                           Catherine Cisinski





























mercredi, novembre 28, 2012

Rêveries de l'esprit créatif

 Tout esprit inventif
cherche à libérer la pierre 

de son poids,
à jeter des cailloux au ciel
pour les fixer dans leur course
juste aux côtés des étoiles.

 Tiendra ?

Tiendra pas ?



 















Ainsi va l’ enjeu du désir marchant,
fruit d’un élan primitif,
épris des lumières 

qu’il tente de séduire,
afin qu’elles se laissent prendre.


Tout pourvu qu'elles s’avèrent consentantes,
décidées à ne jamais lui fausser compagnie,
au ciel de sa mémoire.


C. Cisinski


( On voit ici la 1ère peinture d'une jeune femme
ne maitrisant pas bien la langue française

et qui en quelques mois a su articuler fin et moyens,
et remettre tout en cause dans son existence. 

Diplômée désormais de l'École du Louvre,
elle a créé sa propre entreprise
de restauration de tableau )